Publication : 18 / 07 / 2018

Du 7 au 11 mai 2018, la Semaine du Gouvernement Ouvert (Open Gov Week en anglais) a permis à des milliers d’acteurs du changement de plusieurs dizaines de pays de converger leurs actions sur le plan mondial à travers plus de 700 événements. Au Bénin, l’Association des blogueurs du Bénin et Social Watch Bénin ont saisi l’occasion pour informer, sensibiliser sur les données ouvertes (Open Data) et le mouvement de la science ouverte (Open Research). Les deux organisations de la société civile ont également interrogé les différents parties prenantes, notamment l’exécutif sur le processus d’adhésion du Bénin au Partenariat pour un Gouvernement Ouvert (PGO). A l’heure où le cinquième sommet du PGO s’ouvre cette semaine à Tbilissi en Georgie, retour sur une semaine d’activités intenses et les enseignements à en tirer.

Une semaine de campagne d’information en ligne

Au Bénin, lorsqu’on parle de données ouvertes (open data) ou de gouvernement ouvert (open gouvernement), on est rarement compris en dehors des milieux spécialisés. En effet, le public, en général non averti, n’est pas encore familier avec ces notions et ne perçoivent leur intérêt notamment en matière de bonne gouvernance.

C’est pour cela que dans le cadre de la Semaine du Gouvernement Ouvert, la première action que nous avons menée a été une campagne d’informations : à la fois sur les réseaux sociaux et au moyen d’affiches physiques. Elle a consisté, en utilisant les hashtags de l’événement, de publier des plaquettes d’informations sur ces différentes notions sur Twitter et Facebook. Plusieurs fois par jour, nous publions différentes messages en synchronisation sur les comptes des deux organisations.

Pour ce qui concerne les affiches physiques, elles ont été posées à certains endroits stratégiques comme les universités, certaines administrations publiques ainsi qu’auprès d’autres organisations de la société civile.

Une conférence publique et un forum Gouvernement-Société civile

L’Association des blogueurs du Bénin et Social Watch Bénin ont informé et sensibilisé le monde universitaire sur les enjeux et les intérêts de la science ouverte (Open Research). C’était au cours d’une conférence publique qui a eu lieu à l’Université d’Abomey-Calavi, le premier établissement public d’enseignement du supérieur au Bénin. Lors de cette conférence publique qui a rassemblé plus de 100 personnes (étudiants, blogueurs, acteurs de la société civile, universitaires et médias), des chercheurs et acteurs de la société civile ont partagé différentes points de vue sur la science ouverte. Tous ont montré l’intérêt du mouvement open research pour la science et pour l’accès à la connaissance dans les lieux de recherche au Bénin. Certains ont partagé des expériences qui sont déjà mené au Bénin et sur le continent.

Mais, c’est au cours du forum gouvernement-société civile, que les organisateurs ont interrogé les représentants du gouvernement sur l’état d’avancement du processus d’adhésion du Bénin au Partenariat pour un Gouvernement Ouvert. A cette occasion, les discussions ont tourné largement autour des deux principes de l’OGP que le Bénin ne remplissent pas encore à savoir l’accès à l’information publique et la publication des avoirs et revenus des hauts responsables de l’administration publique et des élus.

Il faut signaler que le Bénin a manifesté son intérêt d’adhérer à ce mécanisme depuis 2015, mais reste toujours inéligible pour la non satisfaction des deux critères évoqués précédemment. Parallèlement, le processus de mise en place d’une plate-forme de données ouvertes ainsi que les raisons de la chute du Bénin dans le classement relatif à la transparence budgétaire ont été évoqués.

Que retenir ?

En définitive, trois leçons essentielles peuvent être tirées de ces différentes activités qui sont autant d’occasions pour écouter et interroger les parties prenantes des différents processus d’ouverture nécessaire pour garantir à la fois la circulation du savoir, dans le cadre de la science ouverte, mais aussi de la redevabilité des pouvoirs publics pour une bonne gouvernance pour ce qui concerne l’open data et le gouvernement ouvert.

1- Le gouvernement béninois n’est pas encore prêt à adhérer aux valeurs du gouvernement ouvert

Il est là une sentence relativement sévère mais les éléments de fait qui l’atteste existent. D’abord, le Bénin a fait une demande d’adhésion au PGO depuis 2015, mais trois ans après, le pays n’est toujours pas encore membre et, visiblement, il n’y a pas de mobilisations particulières à cette fin. Lors du quatrième sommet du PGO à Paris en 2016, nous avions rencontré une délégation de parlementaires qui avait assuré que le pays s’engagerait mais deux ans plus tard, c’est toujours le status quo.

Par ailleurs, la pratique gouvernementale actuelle est en contradiction, au moins en partie, avec les valeurs du gouvernement ouvert et des principes de données ouvertes. Par exemple, les rares services de l’administration publique qui publient des données au public continuent de les publier dans des formats qui sont difficilement réutilisables. Aussi, la publication des avoirs et revenus des élus et hauts responsables de l’administration reste introuvable dans le pays. Lors du forum gouvernement-société civile, un haut responsable de l’administration a tenté différents raisonnements pour justifier cet état de chose sans convaincre le public, ce dernier étant convaincu que l’argent public doit être dépensé en toute transparence ce qui implique que le gouvernement informe des revenus des agents publics et des élus.

2- La société civile doit continuer à jouer un rôle de premier plan

Il est clair, qu’à l’heure actuelle, seules les organisations de la société civile (Association des blogueurs du Bénin, Social Watch Bénin, Wanep-Bénin, Fonac, etc) ont le leadership sur la promotion de l’accès à l’information publique mais aussi le plaidoyer pour l’adhésion du Bénin au PGO. Elles doivent continuer à travailler car, à chaque occasion que ces sujets reviennent en débat, on a l’impression qu’on avance à une vitesse très lente.

Dans le même temps, les organisations de la société civile doivent aussi continuer à se former et à se mettre à jour par rapport aux valeurs d’ouverture qu’elles défendent. Leurs responsables et membres doivent aussi s’approprier ces notions, les maîtriser pour pouvoir les défendre aisément. Il est également nécessaire de créer une synergie d’action entre les acteurs de la société civile.

Pour Pamela Agbozo de Social Watch Bénin :

“L’adhésion à l’OGP doit être une cause autour de laquelle une coalition doit se former comme autour de la création de la Cour des comptes. Le plaidoyer et le lobbying doivent être constant et non se résumer à des actions sporadiques éparses”

3- Le Bénin doit s’inspirer des autres et avoir de la méthode

En 2018, le Partenariat pour un Gouvernement compte plus de 70 Etats adhérents et des milliers d’organisations de la société civile qui défendent ces valeurs sur la planète. Parmi les Etats membres on compte 12 pays africains dont plusieurs sont proches du Bénin à savoir le Nigeria, le Burkina Faso, le Ghana ou encore la Côte d’Ivoire pour ne citer que ceux-là. En réalité, c’est autant d’exemples et d’expériences qui peuvent servir au Bénin pour amorcer son propre processus.

D’ailleurs, au cours des activités du Open Gov Week 2018 au Bénin, l’Association des blogueurs du Bénin et Social Watch Bénin ont fait appel à un expert burkinabé pour venir partager l’expérience de son pays en la matière. L’intervention de Idriss Teg-Wende Tinto a été très appréciée par le public. Elle a permis d’éclairer les uns et les autres et surtout de donner d’autres perspectives aux différentes parties prenantes sur la façon dont elles peuvent collaborer ensemble pour atteindre l’objectif final qui reste l’adhésion du Bénin au Partenariat pour un Gouvernement Ouvert.

 

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